Évaluation du risque suicidaire

L’acte d’automutilation est une méthode de gestion des émotions, et est en cela un acte de survie. Malheureusement, les pensées suicidaires sont souvent également présentes chez les personnes qui s’automutilent. Il est important de prendre en compte ces pensées suicidaires, d’en évaluer la gravité, et d’y réagir de manière appropriée. Penser à la mort est courant chez les personnes en souffrance et ne signifie pas toujours un passage à l’acte; néanmoins, une personne qui indique vouloir mourir est à prendre au sérieux. L’évaluation du risque est une étape nécessaire.

Cette page vous indique comment repérer et évaluer la gravité d’une pensée suicidaire. Les indications mentionnées ici sont à prendre avec réserve, seul un individu formé spécifiquement peut évaluer le risque suicidaire réel.

Repérer les envies suicidaires

Les indices de pensées suicidaires

evaluation du risque suicidairePlusieurs indices peuvent indiquer un risque suicidaire. Les personnes les plus vulnérables aux pensées suicidaires sont généralement les personnes souffrant de trouble mental, les personnes dépendantes, et les personnes ayant déjà fait des tentatives de suicide. Les hommes sont également considérés à risque de par la létalité des méthodes employées.

Les événements critiques peuvent également être indicateur de risque suicidaire et/ou de passage à l’acte. Parmi ces événements, on pensera par exemple à des pertes significatives (pertes amoureuse, deuil, emploi), des échecs touchant aux raisons de vivre, des traumatismes (agression, viol, accident), ou des problèmes disciplinaires (renvoi, emprisonnement, etc.). Il faut également être attentif en cas de perte d’argent, de situation d’exclusion/abandon, de rechutes, ou d’aggravation de consommation. Dans le cas de l’automutilation, une aggravation soudaine de la quantité d’automutilation peut signifier une perte de contrôle, ou que l’automutilation ne suffit plus à réguler les émotions de la personne.

Finalement, sur le plan médical, l’annonce d’un diagnostic peut aussi engendrer des pensées suicidaires par son aspect inéluctable. En cas de prise d’antidépresseurs, le premier mois est également critique en terme de risque suicidaire. Une personne avec pensées suicidaires qui commence à prendre des antidépresseurs devrait être surveillée régulièrement. Enfin, dans le cas d’hospitalisation, les entrées et sorties de la structure hospitalière sont généralement très anxiogènes et peuvent encourager les pensées suicidaires.

Les pensées suicidaires peuvent également être repérées dans les messages ou les agissements de la personne. Les messages peuvent être directs « Je veux me tuer », ou plus subtils. La personne peut se mettre à s’isoler, se négliger ou négliger ses études/son travail, faire des dons soudains, régler des comptes. Du point de vue des émotions, les pensées suicidaires sont souvent associées à de l’anxiété intense, des sentiments dépressifs, de la tristesse, de la fatigue, et de l’impuissance. Finalement, une rémission soudaine, une personne souffrante qui d’un coup semble avoir retrouvé la paix, peut indiquer que cette personne compte se tuer à court terme.

Demander directement à la personne

Si vous pensez qu’une personne a des pensées suicidaires, ou avez un doute, alors il faut lui demander directement. La question doit être claire, formulé au présent, et en utilisant des mots précis.

Est-ce que tu penses à te suicider en ce moment?

Tu sembles vivre énormément de douleur, est-ce que tu as des pensées suicidaires?

Je m’inquiète pour toi, est-ce que tu penses à te tuer?

Poser la question clairement mènera à une réponse claire. De plus, le fait que vous prononciez vous-même ce mot évitera à la personne de devoir avouer cela elle-même. Le fait d’en parler de manière posée et non-jugeante peut également avoir un effet rassurant sur la personne souffrante, qui se sent probablement seule et effrayée par ces pensées. À noter qu’il est bien sûr possible que la personne mente en répondant à cette question. L’évaluation détaillée du risque suicidaire peut donc être utile même en cas de réponse négative.

Évaluer le risque

Le C.O.Q.

Une des méthodes les plus utilisées pour évaluer le risque suicidaire est le C.O.Q., pour Comment?, Où?, Quand? :

  • Comment? : l’individu a-t-il une méthode décidée et à portée pour son suicide?
  • Où? : l’individu a-t-il un lieu prévu pour son suicide?
  • Quand? : l’individu a-t-il une date précise à laquelle il pense se suicider?

Plus ces paramètres sont décidés, et plus le risque suicidaire augmente. Le Quand est le paramètre le plus important, et permet de guider l’intervention. La personne veut-t-elle se tuer ce soir, ou à une date indéterminée dans le futur? Y-a-t-il un événement qui servirait de déclencheur?

Approche multifactorielle d’évaluation du risque

Au-delà du C.O.Q., sept paramètres sont généralement identifiés pour évaluer le risque suicidaire :

  • la planification du suicide : l’individu a-t-il de méthodes prévues, lieu, date, lettre d’adieu pré-écrite, testament?
  • les tentatives de suicide passées : l’individu a-t-il un historique de tentatives de suicide récentes? Comment se sent-il par rapport à celles-ci?
  • le contrôle de soi : l’individu est-il en mesure de contrôler ses pulsions suicidaires, ou se sent-il en perte de contrôle?
  • l’usage de substances : l’individu est-il sous l’influence de substance actuellement? Ou le sera-t-il très prochainement? Quel effet est-ce que ça a sur lui?
  • la capacité à espérer un changement : l’individu est-il capable de voir une fin à la façon dont il se sent? A-t-il encore de l’espoir?
  • la présence de proches : l’individu est-il seul physiquement ou entouré? Peut-il et veut-il parler avec ses proches?
  • la capacité à s’occuper de soi : l’individu mange-t-il? Dort-il? Prend-il ses médications?

Ces paramètres sont à évaluer indépendamment, et peuvent empirer ou protéger du risque suicidaire. Le risque suicidaire global est ensuite à évaluer en prenant en compte tous ces critères. Il se peut que, même avec des pensées suicidaires très présentes, le risque de passage à l’acte soit au final faible. Comme mentionné plus haut, une réelle évaluation et pondération de ces critères demande une formation spécifique.

Que faire en cas de risque significatif

Si avec les informations que vous avez en main vous pensez qu’il existe un risque significatif pour la personne que vous évaluez, plusieurs options s’offrent à vous:

  • appeler un centre d’aide au suicide, ou faire appeler à la personne un centre d’aide au suicide pour une évaluation et des conseils spécifiques. Les proches peuvent aussi appeler ce type de ligne.
  • demander à un médecin ou un psychiatre d’évaluer le risque et au besoin de recommander une hospitalisation.
  • appeler les services de police ou d’ambulance directement, si le risque est imminent.

 

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